Née dans les quartiers nord de Paris, Alice Saey, qui a fréquenté toute jeune le parc de La Courneuve avec ses parents, est aujourd’hui une graphiste et réalisatrice de films d’animation passionnée. Diplômée des Arts décoratifs de Strasbourg, débordante de créativité, elle s’est vue confier la décoration intérieure de la future gare La-Courneuve / Six-Routes.
« Quand j’étais plus jeune, j’allais souvent au parc de La Courneuve les week-ends avec mes parents. Je connaissais la ville pour son passé industriel, les 4 000 et le rap, car beaucoup d’artistes viennent d’ici. » Alice Saey a grandi dans les quartiers nord de Paris. Fille de peintre, elle est rapidement plongée dans l’univers du troisième art et décide alors d’en faire son métier. Elle nous dévoile aujourd’hui ses nombreuses sources d’inspiration. « Je suis très influencée par la peinture moderne de Matisse et Bonnard, par les estampes et le graphisme contemporains japonais, mais aussi par le cinéma d’animation expérimental. J’aime enfin beaucoup les expressionnistes allemands. Ce sont des peintres qui s’intéressent aux foules et aux classes populaires », explique-t-elle avec enthousiasme.
« C’est le rêve, ce projet. C’est un lieu d’exposition énorme dans l’espace public de la région où j’ai grandi, c’est un peu un retour aux sources. »
Diplômée des Arts décoratifs de Strasbourg en design graphique en 2014, elle se tourne vers le cinéma d’animation et d’illustration en autodidacte. Lors de ses études, Alice Saey fait des stages aux Pays-Bas où elle s’installera plus tard. Entre Montreuil et Rotterdam, l’illustratrice postule alors à l’appel d’offres de la Société du Grand Paris. « C’est le rêve, ce projet. C’est un lieu d’exposition énorme dans l’espace public de la région où j’ai grandi, c’est un peu un retour aux sources, d’une certaine manière. » À sa nomination en novembre 2022, elle se voit confier la réalisation de six panneaux équivalents à 19,50 mètres pour la gare de La-Courneuve / Six-Routes.
Pour ce faire, elle entame un travail de longue haleine. Car il n’est pas seulement question d’illustrer, mais de rencontrer les habitant-e-s et leur quotidien et ainsi, de s’imprégner totalement de la ville. « Je me baladais, je prenais des photos et je visitais les différentes Maisons pour tous. Je ne suis pas arrivée avec une idée préconçue de ce que j’allais faire. J’ai découvert le lieu et son architecture, mais aussi l’enthousiasme des Courneuviens par rapport à leur ville. Il y a ici une grosse économie solidaire qui m’a beaucoup intéressée. »
Son objectif : créer une identité commune à travers un tissu, pour donner vie à ses fresques « À la base, je ne représente pas de personnages humains, c’était donc un challenge pour moi. J’aime l’idée que le port d’un tissu est l’affirmation d’une identité sociale, d’un sigle ou d’une appartenance à une famille. Je me suis dit que ce serait intéressant d’imaginer quel pourrait être le tissu de La Courneuve qui collecte tous ses éléments hétérogènes et quelque chose que tous les habitants pourraient s’approprier. Un tissu “mis en mouvement” par les habitants », explique-t-elle.
Un mot revient souvent dans la conversation : ville-monde. « Avec l’approche adoptée par les architectes, qui est de citer l’époque industrielle de la ville, mon rôle d’illustratrice est peut-être de prendre en main le sujet humain. C’était intéressant de voir comment aborder ça. Je me suis demandé ce qu’est le lien des Courneuviens entre eux. On m’a beaucoup parlé de la ville-monde. C’est quelque chose de permanent qui traverse les différentes vagues d’immigrations et cela donne une unité à La Courneuve. Je voulais parler de ça à travers des situations de loisirs, en sortant de l’image de ville industrielle. » Alice Saey travaille sur ces cinq derniers panneaux. « J’aimerais inclure dans les fresques la Maison pour tous Cesária-Évora, l’UCPA et le centre culturel Jean-Houdremont. Cette ville a beaucoup de choses à raconter…»
La gare La-Courneuve / Six-Routes ouvrira ses portes d’ici 2026 et devrait accueillir deux millions de voyageurs, qui pourront admirer les œuvres d’Alice Saey au quotidien.
Texte : Maeva Lasmar Ansel ; photo : Léa Desjours
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