Mabana Sy Sawane : « On gagne toujours à apprendre »

Publiée le 6 janv. 2023

Mabana Sy Sawane : « On gagne toujours à apprendre »

Mabana Sy Sawane

Toujours à l’affût de nouvelles saveurs, de nouvelles rencontres et de nouvelles compétences, Mabana Sy Sawane, pâtissière et entrepreneure, compte ouvrir un salon de thé-librairie à son image : inventif et rassembleur.

Son truc, c’est la créativité. « J’ai toujours bien aimé l’art et j’ai choisi un bac avec une option Arts plastiques, sourit Mabana Sy Sawane. À la base, je voulais être architecte, mais je n’avais pas assez de sous pour financer une école. » Alors, après avoir réussi en 2015 un CAP Pâtisserie en accéléré à l’Agence de formation et de conseil en insertion (AFCI) de Pantin, elle a vite suivi une autre formation, en « cake design » cette fois.

Venu des États-Unis, cet art culinaire consiste à sculpter, modeler et décorer avec de la pâte à sucre des gâteaux spectaculaires, souvent destinés à des événements tels que des anniversaires ou des mariages. « C’est plus visuel que gustatif, parce que c’est assez sucré, mais j’essaie d’allier ça avec mes acquis en pâtisserie classique française pour trouver un entre-deux, en gérant bien le taux de sucre, en faisant des crèmes assez légères... »

Sur sa page Instagram sy.joliepatisserie, elle expose ses créations, qu’elle met des jours à imaginer et à travailler dans les moindres détails, tout en minutie et en patience. « On dessine un prototype sur papier puis on commence toujours par confectionner les détails, comme les fausses fleurs en sucre. » Pendant quelque temps, celle qui a suivi une licence d’administration économique et sociale comme formation initiale jongle entre son métier d’assistante de direction et son activité de microentrepreneure, en tant que traiteure puis pâtissière.

« Il y a forcément des choses qu’on a en commun. »

En 2018, elle décide de se lancer à 100 % dans la pâtisserie. « C’était le moment de me jeter à l’eau, j’avais monté mon business plan, alors j’ai demandé une rupture conventionnelle à mon ancien employeur », explique-t-elle. Son projet à terme ? Ouvrir son propre établissement, un salon de thé-librairie avec aussi une offre de restauration, de préférence à La Courneuve où elle habite depuis 2014 après avoir vécu à Paris et à Montpellier.

« Je lis beaucoup, des contes en particulier, qui apprennent énormément de choses sur les civilisations. Quand j’étais petite, je me suis plongée dans des contes tsiganes et je me suis rendu compte que la morale et les valeurs de ce peuple n’étaient pas si éloignées que ça de celles de mon ethnie en Côte d’Ivoire. » Ateliers de danse, de chant, de lecture, de jeu... Il s’agirait de susciter des rencontres et du partage autour des mets salés et sucrés gastronomiques qu’elle préparerait, principalement avec des produits de saison et issus de circuits courts, et des livres (ouvrages de fiction, romans d’auteur, contes...) qu’elle choisirait. « C’est une ville où il y a beaucoup de communautés qui ne se connaissent pas, si je peux apporter ma petite pierre à l’édifice en faisant en sorte que les gens s’ouvrent aux autres et échangent sur leur culture, c’est tant mieux. Il y a forcément des choses qu’on a en commun. Et quand on prend le temps de s’intéresser à une personne, ça crée du respect mutuel. »

Pour acheter le matériel de pâtisserie et la vaisselle nécessaires, Mabana Sy Sawane a bénéficié fin 2020 d’un Contrat courneuvien de réussite (CCR). En attendant de trouver le local idéal, elle travaille comme cheffe de partie pâtisserie dans un établissement très branché du XXe arrondissement de Paris. Un emploi stable qui lui permet de mettre de l’argent de côté et de gagner en expérience. « Je ne suis pas pressée, glisse-t-elle. Le plus important pour moi, c’est de pouvoir justifier de mes compétences auprès de mes futurs consommateurs. On gagne toujours à apprendre de toute façon. » Un emploi qui lui permet aussi d’expérimenter plein de choses pour le brunch dominical proposé aux client-e-s et d’explorer de nouvelles saveurs auprès d’une collègue japonaise, qui lui a notamment fait découvrir le mochi, un petit gâteau de farine de riz gluant. « Il y a aussi des produits de Côte d’Ivoire ou d’autres pays d’Afrique, comme les fleurs d’hibiscus, que j’aimerais plus connaître et maîtriser pour les intégrer dans mes pâtisseries. J’ai fait une création avec du matcha [thé vert japonais en poudre, ndlr] et des fleurs d’hibiscus en gelée, ça marche bien. » Du beau, du bon et du partage, son credo.

Texte : Olivia Moulin ; photos : Léa Desjours

Mabana Sy Sawane