Le vendredi 5 mai, dans le cadre de l’opération « Une saison avec le Louvre », la médiathèque Aimé-Césaire a organisé une visite guidée de la section « Arts de l’Islam » du musée.
400 salles, 38 000 œuvres, 10 millions de visiteurs par an : le Louvre est le plus grand musée du monde. Donc désolé, on ne pourra pas tout voir... » introduit le guide et archéologue Marouane Ouled Amor en accueillant les usager-ère-s de la médiathèque Aimé-Césaire dans une petite salle de présentation. C’est pour cela que la visite s’est concentrée sur la section « Arts de l’Islam ». « Aujourd’hui on va voyager ! » s’exclame le guide qui énumère différents pays influencés par la civilisation musulmane : Espagne, Maroc, Tunisie, Syrie, Iran, Inde, etc. Cela tombe bien car les habitant-e-s sont venus pour découvrir la richesse d’une culture diversifiée, à l’image de la Ville-Monde courneuvienne.
Œuvres diverses, influences plurielles
Guide, habitant-e-s et accompagnatrices de la médiathèque gagnent rapidement le pavillon Visconti, un bâtiment moderne aménagé dans une cour de l’ancien palais pour exposer les œuvres islamiques. D’emblée, la lumière qui pénètre par les grandes baies vitrées éblouit les visiteur-euse-s, ainsi que le plafond ondulé, en verre et métal, inspiré par les dunes de sable de l’Arabie. Un panneau indique que la construction de ce bâtiment a été permise grâce au mécénat des États du Maroc, du Koweït, d’Oman et d’Azerbaïdjan. À en donner le tournis, le pavillon regorge d’objets, de statues, de portes et fenêtres, de calligraphies, de sabres, de bols, de globes célestes, un ensemble d’œuvres qui témoignent d’influences culturelles croisées. Si l’inspiration commune est musulmane, rien d’uniforme dans l’expression artistique. Le guide explique que les premières œuvres du Louvre ont été acquises par les rois de France, tel ce bassin qui servait à baigner leurs enfants.
Les visiteur-euse-s découvrent d’abord une statue provenant de l’Iran du XIIIe siècle. Surprise : la sculpture a été fabriquée par un Turc. Une fontaine en forme de lion a été réalisée à la même époque, mais dans l’al-Andalus, l’Espagne sous domination musulmane : quand on lui remuait la queue, de l’eau sortait par sa gueule. Un poignard magnifique, composé de jade, d’émeraude et d’or, a été trouvé en Inde et conçu par les Mogols. La pièce la plus ancienne est constituée de linteaux de porte du IXe siècle, issus d’un palais en Irak.
Le guide, à la fois érudit et pédagogue, s’emploie à expliquer le sens caché que recèlent certains objets. Ainsi, une boîte en ivoire de l’Espagne du Xe siècle, en représentant un tigre qui mange des gazelles, montre la volonté pour le calife de « manger » le royaume des Abbassides. Les calligraphies caractérisent tout particulièrement les arts islamiques. On en trouve en arabe, mais aussi en ourdou, en persan et en turc. Ces écritures se nichent parfois dans des motifs, comme dans les étoiles et les feuilles de cette porte d’Iran ou dans cette faïence de même origine. Elles s’inspirent de paroles du Prophète ou de poètes adorés comme le Persan Hafez (XIVe siècle). Une vidéo montre les mille et une manières de dessiner la phrase « Au nom de Dieu, le clément, le miséricordieux ». « Aujourd’hui, avec les smartphones, on a perdu la capacité de dessiner ce type de calligraphie », regrette le guide. Un poème issu du Livre des Rois est représenté, qui a plus de mille ans. « Regardez le monde autour de vous, ouvrez les yeux ! » conclut Marouane Ouled Amor, avant que la visite ne se termine.
Texte : Nicolas Liébault ; photos : Silina Syan