Adel Fugazi : « La Courneuve m’a donné l’envie de m’en sortir. »

Publiée le 7 juil. 2023

Adel Fugazi : « La Courneuve m’a donné l’envie de m’en sortir. »

Adel Fugazi

Membre de la troupe du Jamel Comedy Club, Adel Fugazi, 28 ans, a fait de l’humour son métier. Son seul en scène à Paris annonce des débuts prometteurs.

« Je suis un enfant du service Jeunesse », affirme Adel Fugazi, nostalgique. Adel a grandi à La Courneuve. L’Espace jeunesse Guy-Môquet était son terrain de jeu. « Ils avaient mis en place un atelier avec Réda Seddiki comme intervenant. On se regroupait une fois par semaine avec ceux qui voulaient faire de la scène. Maintenant, je croise Réda dans les comedy clubs. On est très proches. »

Avant la scène, Adel obtient d’abord une licence Administration économique et sociale (AES), puis enchaîne sur un master 1 de droit public à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, qui n’aboutit pas. « Je voulais être fonctionnaire pour la sécurité de l’emploi mais j’ai lâché les études. » Il obtient alors un emploi de surveillant au sein d’un lycée parisien, mais dans un but bien précis « Je voulais être sur Paris pour aller plus facilement dans des comedy clubs. » Surveillant la journée, ouvreur placeur la nuit : une routine qui dure plus d’un an et demi. « Ça me permettait de voir des spectacles gratuits et de comprendre comment ça fonctionne. »

C’est grâce à Patrick, un ami d’université, qu’il met un pied dans le monde du spectacle « Il m’a appris qu’il faisait de la scène. À l’époque, j’aimais déjà beaucoup ça. Je l’ai suivi partout. Il côtoyait des gens que j’admire, genre Alban Ivanov et Bun Hay Mean. Pour moi, c’était un univers tellement lointain. Il m’a fait réaliser que c’était accessible pour un enfant de La Courneuve. »

Adel prend alors des cours de stand-up sur Paris, afin de se perfectionner « Tous les samedis, tu dois faire trois minutes de blagues. Ça te force à écrire et à jouer devant les autres. »

« Sur l'instant, je suis allé où le vent me menait »

Son humour, c’est l’absurde. Il peut vous parler cinq minutes de poules, ou inventer une nouvelle langue. Mais pas question pour lui de s’exercer devant sa famille « C’est pas leur style. Je m’entraîne devant mes potes qui me ramènent sur terre parce que je suis un peu farfelu. » Léa, sa petite sœur, est sa plus grande fan.

Parmi ses inspirations : Roman Frayssinet ou encore Fary. Mais un nom revient aussi constamment : Yacine Belhousse. « C’est mon modèle. C’est génial d’avoir cette proximité avec lui. Ce sont des gens que je croise facilement, ça ne me fait plus rien. Ce sont juste des collègues. »

Adel n’en reste pas moins reconnaissant. Lui qui souhaitait exercer un métier dit « stable » s’est engagé dans une voie qui le surprend chaque jour. « Je suis très heureux de jouer à La Nouvelle Seine. C’est une chance incroyable. Je ne débute pas dans une petite salle, c’est souvent le parcours classique. » Le plus beau moment de sa carrière reste son passage au festival de Montreux en décembre 2022. « C’était très stressant. C’est une salle de plus de mille personnes. C’était filmé, je n’avais qu’une seule prise, mais c’était dingue. »

Lorsqu’il repense à son parcours, Adel confie : « Tout le chemin qui s’est fait, c’est en regardant mes pieds et quand tu lèves la tête, tu te rends compte de là où tu es arrivé. Sur l’instant, je suis allé où le vent me menait. »

Si le Courneuvien passe désormais son temps dans la Ville Lumière, il n’en reste pas moins sensible aux récents événements qui se déroulent dans les banlieues. L’affaire Nahel le touche et Adel s’interroge sur la manière de rire de ce genre de sujets. Car pour lui, chaque humoriste a une manière
singulière d’aborder la vie. « Je ne suis pas engagé, je ne dénonce rien. Mais c’est le genre de choses qui ne devraient pas se produire (…) J’ai un ami humoriste qui réussit à faire rire sur des sujets comme le sous-marin Titan. Moi, ce n’est pas un exercice que je maîtrise. Je pense qu’il faut savoir quelle corde toucher sans être blessant. »

Petit coup de stress pour Adel qui commence à calculer son âge lorsqu’on aborde son futur. « J’espère que j’aurai déjà fait mon deuxième spectacle et que je pourrai payer mon loyer avec mes blagues et avoir ma communauté. Je suis aussi là pour aider les jeunes Courneuviens. »

En juillet, Adel Fugazi est en spectacle tous les mercredis au théâtre de La Nouvelle Seine. Un artiste ambitieux qui déborde de talent et ne demande qu’à faire rire les gens. Ça vaut le détour ! 

Texte : Maeva Lasmar ; photo : Léa Desjours