Une année 2022 sous le signe de l’engagement

Publiée le 5 janv. 2022

Une année 2022 sous le signe de l’engagement

Interview nouvelle année Gilles Poux

Le maire Gilles Poux revient sur l’année écoulée et trace les grands rendez-vous de l’année 2022, dont les importances échéances électorales du mois d’avril (version intégrale de l'interview).

Regards : L’année 2021 a été difficile au regard de la situation sanitaire et sociale. Quelle a été l’importance et le rôle des services publics, notamment municipaux, pour accompagner les habitantes et habitants ?

Gilles Poux : On accuse de tous les maux les fonctionnaires dont il faudrait, si l’on écoute certains, réduire le nombre. Or, dans cette crise, les services publics ont fait la démonstration de leur utilité et les fonctionnaires se sont mobilisés, un parachute indispensable pour éviter que nombre de nos concitoyens sombrent complètement. Cela a été particulièrement vrai bien sûr pour le centre municipal de santé, qui a été un véritable poumon de vie face à la pandémie. Mais cela a été le cas aussi de tous les autres services qui ont repris progressivement leur activité comme le personnel des écoles et des centres de loisirs. Les activités en direction de nos ainés ont également repris, contribuant à les sortir de l’isolement et de la fragilité.

En même temps que faisant face à ces urgences, le service public a aussi été capable de se projeter pour commencer à poser des repères dans la mise en œuvre ambitieuse de notre programme municipal. Je garde ainsi en mémoire le colloque en octobre lors de la journée internationale contre la misère pour comprendre la fragilité sociale des personnes vivant sous le seuil de pauvreté et décliner des actions pour que les gens recouvrent leurs droits et retrouvent les moyens de vivre dignement.

L’année 2021 a aussi vu la tenue du référendum municipal, avec la volonté de restituer du pouvoir de décision régulièrement aux Courneuviennes et Courneuviens. Bien sûr, un référendum n’est pas la panacée, mais il manifeste une vraie volonté de notre ville et une main tendue pour leur dire que c’est de leur vie, de leurs affaires dont il s’agit. « Investissez ce champ d’action, nous on est prêts », leur avons-nous dit. Cet acte se veut refondateur de notre démarche de démocratie participative.

Un travail a aussi été mené sur la jeunesse. Celle-ci est en butte à une société qui ne lui ouvre pas les portes. Les enquêtes, sondages et groupes de parole que nous avons organisés nous ont permis de terminer la séquence par une initiative à laquelle plus de 300 jeunes ont participé, posant des axes de travail comme l’accès aux droits, les études, l’autonomie, les solidarités. Cela a révélé combien la perception de l’insécurité ne se limite pas aux femmes et aux personnes âgées, les jeunes étant les premières victimes des actes de violence.

Bref, en 2021, tout n’a pas été enfermé sous une chape de plomb et nous avons commencé à faire surgir ces exigences légitimes, citoyennes, en écho à notre programme municipal.

 

R. : Quelles sont les projets qui vont marquer le début de l’année 2022 à La Courneuve ? Quels sont les grandes échéances auxquelles vous pouvez déjà donner rendez-vous à la population ?

G. P. : En 2022, il n’y aura malheureusement pas de cérémonie des vœux du fait de la pandémie alors qu’il s’agissait d’un moment un peu festif. Mais nous allons pouvoir nous retrouver dans la construction de la Convention courneuvienne pour la transition écologique et sociale, laquelle se tiendra le week-end du 28 au 29 janvier, un premier rendez-vous public fort, même si on prendra toutes les dispositions sanitaires. La volonté sera alors de donner corps à l’idée que cette nécessaire transition sorte d’un débat culpabilisateur notamment pour les gens les plus fragiles qui sont d’ailleurs souvent les premières victimes des pollutions.

Un second rendez-vous sera, juste avant les vacances de février, la remise en route des comités de voisinage et ce qui a pu s’appeler les « Comment ça va ? ». Notre volonté est de notamment faire le point sur les engagements qui ont été pris suite au référendum et de poursuivre les questionnements. Après cela, en avril, nous rentrerons dans une période très électorale. Les autres rendez-vous sont la fête des associations en septembre et, le 20 novembre, un grand moment pour refonder nos politiques en matière de droits des enfants.

Par ailleurs l’année 2022 est évoquée comme l’occasion d’une forte reprise économique. Comme un trait d’union dans tous ces événements, nous souhaitons tordre le bras aux acteurs économiques pour que notre population bénéficie du train de cette reprise. Les courbes de chômage doivent s’infléchir réellement et notre territoire doit aussi percevoir ces perspectives. Les Courneuviennes et les Courneuviens doivent cesser d’être maltraités. Le taux de chômage est ici trois fois supérieur à la moyenne nationale alors que le territoire produit tant de richesses. Cela sera le fil conducteur de notre année.

Enfin, bien évidemment, en octobre 2022, un nouveau référendum courneuvien sera organisé, dont nous déciderons des questions avec les Courneuviennes et les Courneuviens à la fin du mois de juin. Ce processus va devenir une réelle façon de gouverner sur la base d’une capacité constante à revenir vers eux. Nous nous y tiendrons. Pour donner un exemple, sur la question de la 5G posée lors du dernier référendum, la réponse n’a pas été celle que je souhaitais, mais nous respecterons ce choix car c’est la volonté majoritaire des habitants qui s’est exprimée.

 

R. : Nous sommes déjà entrés en 2022 dans une période électorale majeure avec une élection présidentielle et des élections législatives qui commencent déjà à nourrir tout le débat public. Comme maire, avez-vous un message à faire passer aux habitants ?

G. P. : Mon message est le suivant : quelles qu’aient pu être les désillusions que vous avez rencontrées, ne laissez pas les autres décider à votre place, sinon à chaque fois les décisions ne seront pas conformes à vos aspirations, d’autres décidant à votre place. Je ne peux qu’inviter les Courneuviennes et les Courneuviens à s’engager avec cependant un garde-fou : ne cédons pas aux discours racistes, xénophobes, caricaturaux, qui émergent fortement en ce début de campagne, car il n’y aura pas de bonnes solutions avec ces politiques-là, sauf à nourrir des conflits. C’est une illusion que de croire que cela permettrait à régler les problèmes du quotidien, au contraire cela conduirait qu’à des fractures encore plus douloureuses. Ne cédons pas à ces discours simplistes.

Par contre, je pense que les Courneuviennes et les Courneuviens doivent être très exigeants dans ces débats, qui rejoignent beaucoup d’exigences populaires qui se sont déjà exprimées ces dernières années. Les Gilets jaunes qui sont monté à Paris n’appartenaient pas majoritairement à nos quartiers populaires mais plutôt la France des campagnes autour des ronds-points. Mais le trait commun est le sentiment de ne pas avoir sa place, de ne pas être reconnu, de ne pas pouvoir vivre décemment, y-compris de son travail. Des convergences fortes existent dans la critique d’une société structurée de manière injuste dans la répartition des richesses.

Il faut y réfléchir de manière nouvelle. On nous expliquait que les logiques économiques actuelle étaient indépassables, qu’il n’était pas possible de dépasser les 3% de déficit public sinon cela provoquerait un effondrement de la planète. Or, pour faire face à cette crise, on a aujourd’hui dépassé les 5% et plus personne n’évoque cette barre. On nous bassinait avec les « triple A » des agences de notation, mais plus personne n’en parle plus. Avec le « quoi qu’il en coûte », la politique d’avant a été rangée de côté. C’est la preuve que les politiques peuvent décider de politiques complètement différentes de celles que nous vivons. Il n’y a donc aucune fatalité.

Le chômage partiel généralisé, avec un fort engagement de l’Etat pour compenser, a constitué un amortisseur incontestable, contrairement aux États-Unis où, quand les entreprises s’arrêtaient de travailler, les salariés se retrouvaient au chômage. Il est vrai que les plus riches ont continué à s’enrichir ce qui est scandaleux. Mais c’est la preuve que le curseur peut être déplacé. J’invite les Courneuviennes et les Courneuviens à regarder où l’on doit placer le curseur. S’ils décident avec d’autres de le bouger, il pourra l’être vers plus de justice sociale, de progrès social, de tolérance, de fraternité, plutôt que vers la haine et l’inégalité.

 

R. : Vous-même, comment allez-vous vous engager dans la campagne ? Allez-vous donner votre signature de maire à un candidat et si oui lequel ?

G. P. : Oui, je vais donner ma signature à Jean-Luc Mélenchon, même si je regrette que la situation soit aussi éclatée à gauche, avec une multiplicité de candidatures qui fait que la gauche est dans un grand marasme, en incapacité d’offrir une perspective. Mais, pour ma part, je m’engagerai surtout en disant de quoi les territoires comme le nôtre ont besoin pour permettre aux Courneuviennes et Courneuviens de vivre correctement. Je veux faire la démonstration de quelles politiques nous avons besoin afin que personne ne reste sur le bord du chemin.

Je pense notamment aux personnes âgées : un ainé sur deux vit sous le seuil de pauvreté à La Courneuve. Avec la fragilité économique, les retraités des vingt dernières années arrivent dans des conditions de retraite après des carrières hachées, du temps partiel, d’où des pensions de retraite de 500, 600 ou 700 euros. Or, tant qu’ils n’ont pas atteint 65 ans, ils n’ont même pas droit au minimum vieillesse. Avec cela, concrètement on ne vit plus.

 

R. : Si vous aviez à vous adresser aux Courneuviennes et Courneuviens de manière personnelle, quels seraient les vœux, les conseils, les souhaits que vous leur adresseriez pour ce début d’année 2022 ?

G. P. : Dans les temps que nous vivons, l’on s’aperçoit que, quand on n’a plus la santé, les choses vont de mal en pis. Donc je leur souhaite d’abord la santé, ce qui est un enjeu majeur. Mon second vœu est le suivant : ne vous résignez pas, d’autant plus que cette année électorale peut permettre de faire bouger des réalités qui pouvaient paraître indépassables. Mon troisième vœu : mobilisez-vous. C’est en effet dans votre engagement que vous trouverez du réconfort. Quand on n’est plus seul, on se sent plus fort, on peut sentir de l’entraide, ce qui est crucial dans notre monde qui peut parfois être ressenti comme difficilement maîtrisable. En s’y mettant à plusieurs, on peut obtenir des évolutions : un acquis de tel ou tel côté adoucit la vie et redonne espoir. Surtout, n’abandonnez pas l’espoir aux autres, qu’on le garde chevillé au corps.

Propos recueillis par Nicolas Liébault ; photo : Léa Desjours

Bonne année 2022 !