Précurseur, depuis quarante ans, La Courneuve s’engage pour la poursuite du développement d’une énergie verte : la géothermie. Écologique et économique, cette ressource située sous nos pieds fournit en chauffage et en eau chaude sanitaire plus de 7 000 logements. Comment ça marche ?
Un peu d'histoire
Dans les années 1970, la crise pétrolière et l’augmentation du prix des énergies fossiles frappent de plein fouet les ménages les plus modestes. Pour sécuriser l’énergie fournie à son parc social, La Courneuve décide, dès le début des années 1980, d’exploiter la géothermie disponible dans son sous-sol, via la nappe du Dogger (voir définition ci-dessous), grâce à la mise en place de deux sites où sont implantés les forages géothermiques (rue Politzer et rue du Moulin Neuf). L’objectif : fournir et garantir le chauffage et l’eau chaude sanitaire à bas coûts. Aujourd’hui, ce sont plus de 7 000 logements qui bénéficient de cette énergie renouvelable, ainsi que des bâtiments publics situés à proximité du réseau de géothermie.
La géothermie
Le principe de la géothermie consiste à utiliser la chaleur du sous-sol ayant pour origine la dissipation de la chaleur interne de la terre. Cette chaleur est exploitée grâce à deux forages géothermiques, constituant un doublet : l’un de production pour remonter l’eau chaude (57 °C environ) du sous-sol (1 700 mètres de profondeur) à la surface, l’autre de réinjection pour assurer le retour de l’eau refroidie dans le réservoir à une température de 25 °C à 33 °C. À la surface, l’eau chaude cède sa chaleur, via un échangeur, à un réseau de distribution qui alimente les différents bâtiments de la ville. Un complément de chaleur peut être apporté au réseau par des chaudières gaz selon les températures extérieures ou en cas de panne ou de maintenance.
La technique des forages est respectueuse de l’environnement : afin de ne pas refroidir le réservoir par l’eau réinjectée à une température plus froide, les puits de production et de réinjection doivent se trouver à une distance minimale l’un de l’autre de 1 500 mètres. Par ailleurs, aucun produit nocif n’est utilisé. Au cours des cinq dernières années, le Smirec (voir définition ci-dessous) a procédé à la réhabilitation du doublet géothermique sur le site de Moulin Neuf et à la réalisation d’un nouveau doublet géothermique sur le site rue Georges-Politzer, inauguré en 2019, pour assurer la pérennité de la fourniture d’énergie géothermique sur le territoire de la ville. Ce nouveau doublet a été associé à des pompes à chaleur permettant de récupérer davantage de calories et donc de maximiser l’utilisation énergétique du sous-sol tout en réduisant l’appoint nécessaire en gaz ou électricité, ce qui a permis de réduire la facture énergétique des habitant-e-s.
Et demain ?
Le réseau de La Courneuve poursuit son développement en lien avec l’aménagement urbain. De nombreux logements et équipements publics ont été raccordés au cours des dernières années : le périmètre de la ZAC de la Tour (700 nouveaux logements), le complexe sportif Béatrice-Hess, des ensembles immobiliers existants (immeuble Beaufils, résidence du Parc)… De plus, la Ville a fait inscrire dans les documents d’urbanisme que chaque nouveau projet devait être raccordé à la géothermie, dans la mesure du possible. À terme, d’ici à 2030, ce sont près de 10 000 logements qui bénéficieront de cette énergie verte.
Est-ce que je bénéficie de la géothermie ?
Si vous vous situez dans l’une des zones marquées en rose, vous bénéficiez de la géothermie.
En quelques mots
La géothermie utilise l’eau naturellement chaude située dans le sous-sol de la Terre à une grande profondeur afin de chauffer l’eau du réseau de chaleur qui est distribuée dans les logements et les bâtiments publics (chauffage et eau chaude). Une fois que la chaleur naturelle a été récupérée, l’eau est renvoyée à son point d’origine. Il s’agit donc d’une énergie renouvelable, locale et non polluante.
Qu'est ce que le Dogger ?
Le Dogger est une formation géologique qui correspond à des dépôts anciens (–175 à –154 millions d’années). Il constitue la principale nappe géothermique exploitée en région parisienne. Situé entre 1 500 et 2 000 mètres de profondeur, le Dogger contient une eau d’une température variant de 57 à 85 °C.
QU’EST-CE QUE LE SMIREC ?
Le Smirec (Syndicat mixte des réseaux d’énergie calorifique) exerce le service public de production et de distribution de chaleur (chauffage et eau chaude sanitaire) et de froid sur les territoires de La Courneuve, Saint-Denis, Stains, Pierrefitte, l’Île-Saint-Denis et, depuis juillet 2018, Aubervilliers, aux côtés des offices d’habitation Plaine Commune Habitat et Seine-Saint-Denis-Habitat.
Trois questions à… Pascal Le Bris, adjoint au maire délégué au développement durable
Quels sont les avantages de la géothermie ?
PASCAL LE BRIS : le point le plus important, c’est que la géothermie est une énergie renouvelable. En 2019, on a mis en place des pompes à chaleur qui permettent de limiter encore davantage l’utilisation des énergies fossiles et ainsi de réduire la facture énergétique de près de 30 %, pour les Courneuviennes et Courneuviens qui en sont bénéficiaires. Dans la période actuelle, la moindre économie a son importance. C’est donc une énergie économique, écologique et locale, qui appartient aux habitants parce qu’elle est sous leurs pieds.
Quelles sont les particularités de La Courneuve par rapport à la gestion de cette ressource ?
P. L. B. : la ville de La Courneuve a été pionnière dans le développement de la géothermie en France dans les an- nées 1980. Dès l’origine, le réseau a été géré par le Syndicat mixte pour la géothermie à La Courneuve (SMGC), aujourd’hui le Syndicat mixte des réseaux d’énergie calorifique (Smirec), en régie publique. Il n’y a pas de notion de rentabilité. Ce qui est recherché, c’est l’équilibre financier par rapport aux investissements nécessaires à la réalisation des puits et à leur exploitation afin de toujours tendre vers une fourniture d’énergie la moins chère possible.
Quelles sont les perspectives de développement ?
P. L. B.: À l’heure actuelle, on ne peut pas fournir toute la ville car nous rencontrons des difficultés structurelles, mais à force de mailler le territoire, on trouve de plus en plus de solutions pour étendre le réseau. La construction d’une usine au Fort d’Aubervilliers d’ici 2022 pourrait per- mettre de raccorder aussi le quartier des Quatre-Routes, ce qui était impossible auparavant. C’est un nouveau projet encore à l’étude. L’idéal, ce serait de pouvoir apporter la géothermie à l’ensemble de la ville.
Textes : Vanessa Jollet ; visuels : Smirec, Syndicat Mixte des réseaux d’énergie calorifique