Il y a 150 ans, place à la Commune !

Publiée le 31 mars 2021

Il y a 150 ans, place à la Commune !

Barricades

La Commune de Paris de 1971 a inspiré les mouvements révolutionnaires  du XXè siècle et les progressistes s’en sont nourris dans la mise en œuvre  de leurs politiques. Cela est vrai dans l’action des gouvernements et dans celle de nombreuses municipalités. La Commune de Paris fait figure d’avant-garde dans beaucoup de domaines.

L’expérience n’a duré que du 18 mars au 28 mai 1871 , mais démocratiquement, le legs est immense. Les communards, souvent de simples ouvriers, ont d’abord prouvé, dans un contexte d’effondrement de l’État, qu’ils pouvaient gérer par eux-mêmes les affaires publiques. Coordonnés par Andrieu, ancien employé à l’Hôtel de Ville, l’administration parisienne a été dirigée par des républicains actifs en lieu et place des agents municipaux. Et si les commissions municipales d’arrondissement étaient en 1871 nommées par les membres de la Commune, la Garde nationale a expérimenté une forme originale de démocratie directe. La Commune a également ouvert le droit de vote et d’éligibilité aux étrangers, avec de grandes figures comme le Hongrois Léo Frankel, le Polonais Jaroslaw Dombrowski ou la Russe Élisabeth Dmitrieff. Les femmes ont aussi été très présentes pendant la Commune, le droit de vote leur ayant été ouvert dans plusieurs quartiers. Sur le plan de la démocratie sociale aussi, les avancées sont notables. Theisz, ouvrier bronzier, fait fonctionner la poste et crée pour cela un Conseil consultatif des employés où les travailleurs pourront participer aux décisions de l’entreprise. Les artistes parisiens se groupent en fédération le 14 avril sous l’impulsion de Courbet. Celle-ci est dirigée par un comité élu au suffrage universel des artistes. Si, dans le contexte du premier socialisme, on ne « communalise » pas encore la vie économique, le 16 avril, on recense et on réquisitionne des ateliers abandonnés qu’on confie à des ouvriers associés, à qui on donne la préférence pour les marchés sur les entrepreneurs privés.

Des avancées sociales importantes

L’éducation est aussi privilégiée. C’est le domaine du délégué Édouard Vaillant, 31 ans, aidé dans sa tâche par les organisations républicaines nées à la fin de l’Empire pour la promotion d’un enseignement laïc. À la mi-mai, le traitement des instituteur-rice-s est doublé, avec pour la première fois une égalité de rémunération entre les hommes et les femmes. On complète l’enseignement primaire par un enseignement professionnel, avec l’ouverture de cinq écoles féminines. La moitié des écoles publiques de Paris étant aux mains des congrégations religieuses depuis la loi Falloux de 1850, les commissions communales de nombreux arrondissements les laïcisent. D’ailleurs, le 2 avril, la Commune décrète la séparation de l’Église et de l’État.

Socialement, les avancées sont importantes. La commission du travail et de l’échange, dirigée par l’ouvrier Frankel, interdit les amendes et retenues sur les salaires et décide, le 5 avril, de mettre en place dans chaque arrondissement un Bureau municipal de renseignement où se confronteraient l’offre et la demande, afin d’éviter le prélèvement au passage par des intermédiaires. Le 20 avril, le travail de nuit des ouvriers boulangers est supprimé. Des boucheries municipales et des cantines pour les indigent-e-s sont ouvertes dans les arrondissements. Dans les hôpitaux, les sœurs de la Charité sont remplacées par des infirmières laïques. Les jeux de hasard sont interdits dans la rue, les maisons de tolérance sont fermées et tout citoyen en état d’ivresse est arrêté car « les ivrognes oublient et le respect d’eux-mêmes et leur devoir de citoyen ». Les objets engagés au mont-de-piété d’une valeur inférieure à 20 francs sont restitués. Certes, en si peu de temps, sous la menace d’une destruction militaire par le gouvernement de Thiers installé à Versailles et alors que le mouvement ouvrier est encore balbutiant, les réalisations de la Commune de Paris n’ont été que partielles. Mais ce grand événement continue d’inspirer celles d’aujourd’hui.

Texte : Nicolas Liébault 

Sources :

– Jacques Rougerie, La Commune et les Communards, Gallimard, 2018

– Jean-Louis Robert (dir.), Le Paris de la Commune 1871, Belin, 2015 


 

Les grandes dates de la Commune de Paris

1870

  • 19 juillet : début de la guerre entre la France et la Prusse
  • 2 septembre : désastre de Sedan
  • 4 septembre : chute du Second Empire
  • 18 septembre : début du siège  de Paris par l’armée prussienne           

1871

  • 28 janvier : armistice – fin du siège de Paris
  • 8 février : élections législatives – majorité monarchiste
  • 19 février : Thiers, chef du gouvernement de Versailles
  • 26 février : signature des préliminaires de paix
  • 3 mars : constitution de la Fédération de la Garde nationale de Paris
  • 18 mars : Thiers cherche à enlever les canons de la Garde nationale : insurrection de Paris
  • 26 et 28 mars : élections  et proclamation de la Commune  de Paris
  • 2 avril : début de la guerre  entre Paris et de gouvernement de Thiers
  • 1er mai : création du Comité  de salut public
  • 21 mai : entrée des Versaillais dans Paris
  • 21 mai à 28 mai : « semaine sanglante » (massacre  des communards)

 

Commune illustration

Illustration : Dugudus, extraite de l'ouvrage NOUS LA COMMUNE disponible sur le site internet nouslacommune.fr.