Thelma Gies mène en parallèle des études à Sciences Po Paris et la pratique du football américain au sein de l’équipe féminine du Flash. Elle est au poste de quaterback. Cohésion et exigence sont les valeurs qu’elle a retrouvées dans cette discipline sportive encore minoritaire en France.
Elle est née six jours après l’an 2000, « mais pas encore au XXIe siècle qui n’a commencé qu’en 2001», précise-t-elle, réaliste comme la « génération Z ». Sa force, elle la doit d’abord à sa famille. Depuis l’enfance, Thelma Gies vit avec sa mère et son frère aux Pavillons-sous- Bois, son père résidant en Normandie avec ses deux autres frères. L’ambiance est « soutenante », que ce soit chez son père, intermittent du spectacle, ou chez sa mère, sage-femme. « Ils m’ont poussée à faire tout ce que je voulais faire, convient-elle, dans mes études comme dans mes activités. » École primaire et collège aux Pavillons-sous-Bois, lycée à Bondy : de sa scolarité, Thelma Gies n’a que des souvenirs heureux, « d’autant que j’étais plutôt bonne à l’école, avec certaines facilités », reconnaît-elle avec cette simplicité souriante qui la caractérise. Elle y a noué des liens qui se poursuivent, « de grandes amitiés que je compte sur les doigts d’une main mais qui sont très importantes pour moi ». Rien ne prédisposait la jeune fille à se lancer dans le football américain. Elle l’admet : « Nous ne sommes pas sportifs dans la famille. Quand j'étais petite, avec mon frère, on faisait du taekwondo que j’ai arrêté pour le théâtre. J’ai aussi voulu jouer au basket, mais ça ne m’a pas plu. » Et pourtant c’est par le biais de sa famille qu’est née sa vocation : « Mon frère lisait un manga qui parlait de football américain et comme je voulais tout faire comme lui, j’ai voulu y jouer quand il s’y est mis. » À 11 ans, dans le jardin, elle lance un ballon de football américain à son frère, quand un jeune homme passe dans la rue : « C’est drôle, je joue au Flash, le club de La Courneuve. Si vous voulez, vous pouvez assister à un match ! » « On n’est pas allés au match mais, l’année suivante, je me suis inscrite au flag, du football mais sans plaquage », raconte-t-elle. Je suis tombée amoureuse de ce sport, " trouvant au club solidarité, discipline et cohésion. Elle intègre les minimes et, depuis un an, l’équipe féminine.
"J’y ai appris la persévérance car on a peur de ne pas être à la hauteur des autres joueurs. "
Les cinq premières années, Thelma est la seule fille de l’équipe : « J’y ai appris la persévérance car on a peur de ne pas être à la hauteur des autres joueurs. Pourtant, les filles peuvent être meilleures que les garçons ! » Ses parents ont peur que leur fille soit mise à l'écart, mais "les coachs ont été clairs et les garçons n’ont jamais fait de différence », explique-t-elle. « J’ai eu une fracture de l’humérus et une fracture déplacée du poignet, mais ça ne m’a pas démotivée, bien au contraire. » Thelma Gies est quarterback, un poste intermédiaire entre le coach et les joueurs d’attaque. « Tout revient sur ma tête, nous explique la jeune fille. On doit anticiper : quand je lance, je dois bien connaître la vitesse des joueurs. » C’est aussi le manga qui a décidé de cette vocation, le personnage du quarterback étant son préféré. « À 11 ans, lors du premier entraînement, quand j’ai dit que je voulais être quarterback, ils m’ont répondu : “Ouah ! On va voir ! On va voir !” Mais mes coachs m’ont fait confiance et je leur en serai reconnaissante toute ma vie. » Thelma Gies s’identifie à « Danny » Amendola, un receveur américain. « Il m’a beaucoup inspirée car au début personne ne voulait de lui. Or, depuis quatre ans, il excelle. » Actuellement en deuxième année à Sciences Po Paris, l’étudiante de 20 ans va effectuer un stage d’un an aux États-Unis. « J’ai choisi l’université Eugene dans l’Oregon, car il y a une de mes équipes préférées. Et ils ont un très bon niveau de recherche en histoire. » Depuis la terminale, la jeune fille veut faire profession d’historienne. Concilier Sciences Po avec son sport demeure « compliqué, surtout quand les entraînements finissent à 22 heures, que j’ai plus d’une heure de transport pour rentrer chez moi et que le lendemain je me réveille à 5h30 avec une heure et demi de transport jusqu’à Sciences Po ». La première année a été mentalement dure, mais cette deuxième année se passe bien. Cela n’entame pas sa détermination : « J’arrêterai le football américain quand mon corps m’empêchera de le pratiquer », conclut-elle. Tout est dit.
Texte : Nicolas Liébault ; photo : Léa Desjours