Faire rimer écologie avec égalité

Publiée le 27 oct. 2020

Faire rimer écologie avec égalité

Urgence climatique et sociale

Le conseil municipal qui s’est tenu le jeudi 8 octobre a déclaré La Courneuve en urgence climatique et sociale. Une réponse à une dégradation mondiale de l’environnement ainsi qu’à la montée des inégalités sociales. Des mesures seront mises en œuvre afin de concrétiser cette déclaration.

La Courneuve : une ville verte ? À l’instar d’autres municipalités et intercommunalités, la Ville entend répondre au danger écologique pesant sur le territoire, sur l’humanité et sur la nature. La déclaration par la municipalité de l’urgence climatique et sociale le jeudi 8 octobre va dans ce sens. Son originalité : associer l’approche écologique avec la lutte pour la démocratie, contre les inégalités sociales et contre les discriminations. En cela, elle s’oppose à une écologie « punitive », qui voudrait faire payer aux plus modestes le prix de la lutte contre le réchauffement climatique alors même que ce sont les plus riches qui en sont responsables. L’objectif est de sortir La Courneuve d’une « double peine » : celle d’une dégradation de l’environnement qui s’accompagnerait d’une montée des inégalités. « Quand nous superposons les cartes géographique et typologique de notre territoire, nous nous apercevons que la pollution de l’air, les nuisances sonores, les déficiences sanitaires et les faibles revenus occupent sensiblement les mêmes zones », détaille Pascal Le Bris, adjoint délégué au développement durable. Et de citer la proximité de l’aéroport du Bourget, les autoroutes surchargées A1 et A86, un tramway vétuste et brinquebalant...

Deux axes forts

Comment la transition écologique peut-elle favoriser le mieux-vivre de tou-te-s? En en tenant compte dans toutes les politiques municipales. Déjà, « la Ville s’inscrit dans cette ambition avec le chauffage urbain par géothermie, le plan d’urbanisme ou la basse consommation des bâtiments », poursuit l’élu. Avec la délibération, la municipalité souhaite aller plus loin, notamment en plaçant sous contrôle démocratique toute la démarche. C’est pourquoi, dans vingt-quatre mois au plus tard, se tiendra une conférence communale pour le développement durable associant habitant-e-s et usagers. Dès à présent, la délibération met en avant deux axes forts. Un premier axe est l’engagement «à créer une mission d’information et d’évaluation concernant les dépenses énergétiques réelles des bâtiments construits ou à construire sur le territoire de la commune ». Un second axe consiste à « faire de la Métropole du Grand Paris un territoire polycentrique favorisant les liens de proximité et le droit à la ville, y compris dans le cadre de la mise en place de la zone à faibles émissions (ZFE), cette dernière nécessitant des aides spécifiques ouvertes à toutes et tous. » Ces propositions seront mises en débat dans la population.

Textes : Nicolas Liébault ; photo : Thierry Ardouin

Des jeunes engagés pour le climat

Bahar Ilhan et Dany Phrakornkham ont pris conscience de la question écologique en seconde au lycée Jacques-Brel, leur professeur M. Ryem Boudjemaï leur proposant de devenir écodélégué-e-s. Pour eux, qu’il y ait urgence climatique et sociale est « plus qu’une évidence », même si, regrette Bahar, « on reste une petite minorité sensibilisée dans la jeunesse ». « Certains le pensent mais ne l’expriment pas autour d’eux », tempère Dany. Elle et lui se sont faits missionnaires dans leur propre famille, insistant pour éteindre les lumières ou trier les déchets. Leur explication des résistances familiales ? « Ce qui importe le plus pour les parents est que les enfants soient nourris, aillent à l’école. Le revenu est limité, donc la priorité c’est nous ! » explique Bahar. Elle donne l’exemple de la voiture électrique: « Il y a la prime à la casse mais peu de monde est au courant. Or, une voiture hybride n’est pas forcément accessible. » Pour les jeunes gens, sensibiliser les habitant-e-s implique de les associer. « Si les décisions sont imposées, ils seront encore moins d’accord », craint Bahar. En cas de référendum courneuvien sur les enjeux climatiques et sociaux, ils ont leur idée de question : « Êtes-vous pour ou contre la fermeture de l’accès aux voitures de l’avenue Victor-Hugo ? » Mais le référendum ne fonctionnera que si « des agents municipaux maîtrisant les langues expliquent directement les questions posées aux habitants ». Bahar et Dany déplorent que « les pays riches veuillent améliorer l’économie au détriment de l’environnement ». Pour autant, elle et lui portent un regard nuancé sur les mobilisations des jeunes pour le climat. « Les manifs font un peu peur à nos familles», constate Bahar. Plutôt qu’une violence qui « ne sert à rien », Dany et Bahar estiment que les actions doivent être « ciblées », par exemple par le biais de pétitions. Et ont bien l’intention de participer à ces batailles.

Photo : Léa Desjours

Bahar et Dany

Les engagements municipaux

Pour la mandature 2020-2026, la Ville a pris une série d’engagements dont certains dépendront de sa politique et d’autres de la mobilisation collective pour les obtenir. Parmi ceux-ci : des dispositifs contre le bruit des autoroutes et la réduction de la vitesse sur ces axes à 70km/h ; une rénovation énergétique des bâtiments ; un transport scolaire gratuit ; des circuits courts via l’agriculture urbaine; un usage du vélo facilité ; un revenu minimum courneuvien garanti ; 2024 arbres plantés d’ici à 2024; un plan local de réduction des déchets ; un référendum courneuvien sur les enjeux climatiques et sociaux ; une passerelle au-dessus de l’A1 pour accéder au Parc de La Courneuve ; la reconversion des usines KDI en centre-ville écoresponsable et celle des usines Babcock en nouveau quartier ; la protection de la biodiversité; un héritage écologique et social des JOP 2024 ; un budget participatif contribuant au bien-être écologique et social.

Liste des engagements

La municipalité

  • s’engage à mettre en place les engagements suivants pour le climat et la solidarité pour le mandat 2020-2026:
  • lutter contre les nuisances autoroutières et exiger la mise en place de dispositifs anti-bruits ainsi que la réduction de la vitesse sur ces axes à 70 km/h,
  • lutter contre la précarité énergétique des habitant.e.s dans l’immobilier public et privé, via un plan de rénovation énergétique et via une mobilisation forte auprès des bailleurs
  • poursuivre la rénovation énergétique des bâtiments municipaux,
  • mettre en place le transport scolaire gratuit,
  • privilégier les circuits courts et le bio, l’agriculture urbaine, les jardins partagés, et une alimentation de qualité dans les cantines
  • faciliter l’usage du vélo,
  • expérimenter un revenu minimum courneuvien garanti,
  • planter 2024 arbres d’ici 2024,
  • créer un guichet unique de la mobilité pour accompagner les habitant.e.s dans l’acquisition d’un véhicule plus propre,
  • améliorer le cadre de vie, notamment en instaurant un plan local de gestion et de réduction des déchets,
  • créer des emplois en développant l’industrie verte,
  • sortir d’un système éducatif qui reproduit les inégalités au lieu de les corriger
  • valoriser la diversité de notre ville-monde, notamment grâce à notre partenariat avec l’UNAOC (L'Alliance des civilisations des Nations unies),
  • partager les pouvoirs de faire et de décider, notamment via la mise en place d’un référendum courneuvien qui se prononcera sur les enjeux climatiques et sociaux,
  • mesurer le bilan carbone / énergétique des projets de la Ville dès qu’ils ont un impact.
  • S’engage à donner la priorité à l’aménagement durable créateur de proximités et d’accessibilités douces pour favoriser l’accès aux services publics et notamment pour recréer un véritable centre-ville courneuvien rendant la ville moins impactante pour le climat : en finalisant la réalisation de la passerelle au-dessus de l’A1 pour créer un accès direct au Parc de La Courneuve, en reconvertissant les usines KDI en centre-ville écoresponsable, en reconvertissant les usines Babcock en nouveau quartier, en développant la nature et l’eau en ville pour lutter contre le réchauffement climatique et les canicules, pour protéger et développer la biodiversité, en accompagnant l’arrivée de la gare des Six-Routes et du Grand Paris express, en veillant à ce que les Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 donnent un héritage écologique et social, en aidant au développement des industries vertes dans les zones industrielles de la Ville, dont la zone industrielle Mermoz, en mettant en œuvre un budget participatif contribuant au bien-être écologique et social.