Babcock : un lieu déjà source de création

Publiée le 16 déc. 2021

Babcock : un lieu déjà source de création

Graffitti Babcock

L’architecture et l’histoire de l’ancienne usine de chaudières inspirent de nombreux artistes urbains.

C'est un drôle de musée. Un musée clandestin, inaccessible au public et temporaire, mais un musée bien vivant, où se déploient sur les murs, les vitres et les éléments de mobilier les pièces de graffiti qu’une quarantaine d’artistes ont peintes et peignent en bravant le
système d’alarme et de surveillance. « Comme l’activité a cessé en 2012, les fans d’urbex (abréviation d’« exploration urbaine »,
pratique qui consiste à visiter des lieux construits mais abandonnés ) et les premiers artistes ont potentiellement commencé à explorer les lieux l’année suivante. Mais c’est pendant le confinement que les graffeurs ont vraiment investi le site, ils étaient tranquilles », indique Thomasine Zoler, historienne de l’art, conférencière et chargée de projets artistiques spécialisée en art urbain.

Se réunir entre artistes

Lettrages, motifs figuratifs ou abstraits, personnages : les graffitis ont effectivement envahi les halles de Babcock, par le biais notamment des artistes STO, Namaste et Zkor, qui y ont réalisé de nombreuses œuvres et y ont invité d’autres graffeur-euse-s qu’ils estiment ou dont ils apprécient le travail. « Faire du graffiti, ce n’est pas juste mettre un coup de peinture, c’est se réunir entre artistes pour un moment de partage », précise Thomasine Zoler.


Originaire de Sevran et cofondateur du mouvement Black Lines, qui propose aux artistes de tous bords de témoigner de la réalité politique et sociale dans l’espace public, Lask TWE a réalisé deux lettrages dans l’ancienne usine. « Ça faisait longtemps que je n’avais pas ressenti un tel vertige en entrant dans un lieu, face à sa beauté, face à son histoire, face à ses possibilités. Il y a tellement de choses à faire, les murs sont tous différents ! » Il n’est pas le seul à être tombé sous le charme de cette cathédrale industrielle. « L’architecture et la mémoire particulières du site en font un terrain de jeu particulier pour les artistes, confirme la spécialiste de l’art urbain. Certains se sont renseignés sur son histoire et sur la vie des ouvriers, à qui une dédicace est adressée. » Investies également par des colleuses qui luttent contre les féminicides et les violences faites aux femmes, les halles font ainsi le trait d’union entre l’art et les combats, entre le passé et le présent.

Texte : Olivia Moulin ; photos : Léa Desjours